Anecdote d’un dimanche ordinaire
En ce dimanche 1er février 2015 je peins les gardes corps de mes fenêtres d’un vert franc.
Il me reste un fond de peinture. Un fond de peinture que je ne réutiliserais probablement jamais.
Est-ce que je propose à la voisine du 3e de verdir ses propres gardes corps ?
Est-ce que je peins un élément de mobilier urbain de la place pour l’égayer un peu ?
De passage par la Plaine, Jérémy monte prendre un café.
Je lui fais part de ma question verdissante.
Collé à la fenêtre, Jérémy à côté de moi, je désigne les protèges arbres en fer comme bon support.
Il approuve et suggère aussi un anneau de peinture sur un tronc. Il s’en va.
Je frappe à la porte de la voisine. Pas de réponse.
Je vais dehors et je peins un protège arbre de mon vert franc.
En son centre pousse un micocoulier.
Il me reste encore de la peinture, je démarre l’anneau.
La peinture se glisse entre l’écorce, ce n’est pas écolo.
J’ajoute une dernière touche, je perfectionne.
Une voiture de police s’arrête à ma hauteur, trois agents en descendent.
« Qu’est-ce que vous faîtes Monsieur ?
– Il me restait un fonds de peinture donc plutôt que de le ranger au fond d’un placard j’ai décidé d’apporter une touche de couleur à la place.
– Et si tout le monde faisait comme vous la ville serait multicolore !!
– Mais oui, justement.
– Et bien Monsieur la société elle est pas comme ça ! Vous n’avez rien d’autre à foutre de vos dimanches ?! A 12 ans je veux bien mais à votre âge !! »
Son collègue : « Les barres en fer à la limite, ça égaye, mais l’arbre non Monsieur, c’est pas possible, c’est pas bon pour lui, c’est chimique, c’est pas écolo. »
L’autre reprend : « Vous avez une pièce d’identité ? Vous habitez où ?
– Là Monsieur, en face.
– Montrez-moi. »
On s’approche de l’interphone de l’immeuble. Je lui montre la sonnette avec mon étiquette. Mon nom et celui de la Folie Kilomètre…
Il avance son doigt et pointe le mot « Folie », il se tourne vers ses collègues.
Je monte chercher ma carte d’identité.
« Bon Monsieur, pour les barres ça ira mais vous nettoyez l’arbre. On va pas attendre que vous ayez terminé mais on repassera ».
Brosse, chiffons, white spirit, eau chaude.
Je frotte, je gratte, j’inonde. Je refrotte, je regratte, j’inonde. Un vert franc dégouline sur l’écorce.
Ils repassent : « Y a encore du travail ! ».
Je frotte, je gratte, j’inonde. Je refrotte, je regratte, j’inonde. Un vert pâle dégouline sur l’écorce.
Autour du tronc, à la limite de l’anneau de peinture disparu, je scotche un panneau.
« ATTENTION PEINTURE FRAICHE ».
Floris, le 2 février 2015