C’est le vendredi 19 et 20 février dernier que plus de 150 spectateurs se sont infiltrés dans l’hôtel mystérieux : le Best Western Central de Tours.

L’histoire comme si vous y étiez :

Votre groupe de 25 tourangeaux est accueilli par les réceptionnistes de l’hôtel comme des séminaristes. Dans la salle de conférence, Richard, personnage au bagou et aux idées farfelues, vous attend. Power point à l’appui, il vous présente son nouveau concept « Hotel Obscura ».

Féru de rencontres internationales, HOTEL OBSCURA est le nom de sa start up qui permet aux voyageurs et aux habitants d’une ville de se rencontrer, le temps d’une soirée. Voyage inversé, ce sont les voyageurs qui reçoivent !

Aujourd’hui le monde est au bout de la rue…

L’hôtel Best Western est un étrange lieu chargé de milles histoires qui crépitent dans le dédale de cet ancien couvent. Vous partez en exploration dans ce décor de cinéma à la recherche d’autochtones, de fragments de réalité…

Vous entrez dans Hotel Obscura comme on entre dans un autre monde. Vous n’étiez jamais entré dans cet endroit qui est pourtant si proche de chez vous. L’ambiance est feutrée et silencieuse car l’hôtel est en marche. Les frontières se brouillent, on ne sait plus qui est en jeu ou pas, qui travaille ici, qui explore, qui est client, qui est spectateur…

Certaines portes ont des gommettes dorées. Si elles sont fermées frappez et entrez dans la chambre d’un client qui a accepté de rencontrer des habitants pour la soirée. Si la porte est entrouverte, entrez dans la chambre d’un inconnu en son absence que peut être vous aurez rencontré au bar, dans les escaliers, dans les couloirs… car le panneau « Ne pas déranger » sur la poignée d’une autre porte vous aura demandé de revenir plus tard.

Vous auriez pu entrer dans la chambre d’un, deux ou trois clients dont nous vous racontons brièvement l’histoire :

Chambre 118

Eirini est grecque, aujourd’hui elle fête son anniversaire. Elle parle un français hésitant et délicat mais saisi l’occasion offerte par Richard pour vous proposer de partager un rituel fort autour du mythe d’Euridice. Elle vous invite à entrer dans sa salle de bain à condition de rester toujours de dos en tenant un petit miroir dans lequel vous pouvez la voir. Vous échangez sur l’amour et sa fragilité et elle vous danse cet amour dans la baignoire.

Chambre 115

Mario est un journaliste sportif autrichien. Il regarde un match de football sur un ordinateur posé sur son lit en buvant une bière. Il est en train de préparer sa valise, ses vêtements sont éparpillés sur son lit. Vous remarquerez qu’il y a des vêtements d’hommes et de femmes. Il parle français très lentement, il cherche ses mots mais comprends très bien. Petit à petit vous avez une discussion sur le genre, votre identité sexuelle est-elle fixe ou changeante ?

Chambre 101

Quentin est contrôleur SNCF, il est en transit ici avant de retourner demain à Paris en train. A la demande de Richard, il a imaginé un petit scénario à offrir à ses visiteurs. Il aime le mentalisme et les parties d’échecs, la rencontre mais reste un grand timide. Il vous propose un jeu de questions réponses qui vous permettrons de vous dévoiler tour à tour, de partager vos secrets, vos envies les plus précieuses, afin de savoir si vous êtes oui ou non, deux âmes sœurs qui attendaient de se rencontrer.

Chambre 222

Gabriella a installé clandestinement un labo photo dans sa salle de bain, il fait sombre, il y a des tirages suspendu sur les murs, ça sent le fixatif. Elle développe des négatifs d’il y a 15 ans que son ami hongrois lui a envoyé par surprise. Vous faîtes apparaître des images dans les différents bains à la lumière inactinique. Certains visages des clients des autres chambres se révèlent… Elle vous demande si elle peut vous tirer le portrait.

Chambre 503

Järva est suédoise. Elle ne parle pas du tout français. Elle vit dans une suite de l’hôtel pour un temps. Elle est très jeune et un peu perdue. Elle est en voyage à la suite à un drame familial. Elle se ressource en parcourant le monde en collectant images, témoignages et autres traces sensibles de couchers de soleil. Elle vous propose d’échanger avec elle à travers un logiciel de traduction sur son ordinateur au clavier suédois…

Chambre 107

Elise est australienne. Elle s’exprime uniquement en anglais et de manière très rapide. Autant dire qu’on a du mal à la comprendre. Sorte d’anthropologue obsessionnelle, elle mène une enquête sur les traces que l’on peut laisser dans ces lieux de passage. Sa chambre d’hôtel requière un passage secret vers les escaliers de services et vous invite à entrer dans un monde parallèle.

Chambre 332

Julien est un parisien qui achève une randonnée de 10 jours de chez lui à Tours. Très sensible il est assez bourru et s’est offert sa dernière nuit à l’hôtel. Mais il a finalement du mal à revenir à un environnement « normal », du coup il a mis sa tente sur son lit et cuisine au butagaz des oeufs au plat. Vous parlez avec lui de la solitude, de voyages et de grandes traversées du désert.

Chambre 335

Arthur est musicien, il a fait un gros concert à Tours. Une récente rupture amoureuse l’empêche de rentrer chez lui et le laisse en mal d’inspiration. Recevoir des tourangeaux est pour lui l’occasion de retrouver un contact direct avec un public, d’échanger et d’écrire de nouvelles chansons. Il vous reçoit dans sa grande chambre avec sa guitare et la discussion amènera à ce qu’il vous compose quelque chose.

Chambre 410

Lucie vous accueille dans une des plus belles chambres de l’hôtel pour vous associer à son projet de décoration. Elle travaille à créer un ADN Best Western de manière à homogénéiser et identifier le groupe. Elle observe, prend des mesures, étudie les usages des voyageurs, afin de dessiner des sets pour revisiter la chambre « standard ». Vous pouvez partager vos expériences en la matière.

Chambre 443

Clothilde Bernard est une infirmière en formation à Tours. Pour elle la proposition de Richard est l’endroit de la métamorphose. Très touchée par la mort récente de David Bowie, elle lui rend hommage en chantant dans sa salle de bain avec vous qui êtes devant un karaoké sur le lit. Mais c’est pour elle une première, elle n’a jamais chanté devant des inconnus. Vous êtes amené à discuter de la perte, de la mort d’un être cher. Si vous en avez envie évidemment.

Chambre 327

Abigaël est à l’hôtel comme dans une sorte de refuge. Cet espace hors du temps doit lui permettre de finaliser l’écriture d’un premier roman graphique sur un voyage qu’elle a fait chez elle il y a deux ans : le GR2013. Abigaël discute avec vous de la trame de son projet et de comment le mot résistance résonne chez vous. Elle vous dessine et peut être que vous acceptez aussi de la dessiner tout en partageant vos visions du monde.

Chambre 328

Arnaud est à Tours en week end. Il n’a pas vraiment le temps, il est entre deux portes mais fini par vous accueillir en coup de vent. Il ne sait pas vraiment dire non, c’est pour ça qu’il s’isole un week end par an pour réaliser sa collection de timbres. C’est aussi un grand gourmand de pâtisseries, avec qui vous pourrez partager vos bonnes adresses à Tours et le fruit de ses pérégrinations tourangelles…

Dans les couloirs, vous croiserez peut être Vincent, maître d’hôtel qui s’affaire au room-service. Ce soir les demandes affluent et Vincent se démène pour satisfaire toutes les demandes, même les plus farfelues. Si vous redescendez au bar, Julien vous accueillera d’un air complice et vous pourrez siroter un verre en compagnie d’autres voyageurs, en découvrant une playlist sélectionnée pour l’occasion.

Tout le monde se retrouve ensuite dans la suite de Richard, chambre 441, qui souhaite remercier tous le monde.

Nous sommes peut être 40 dans sa chambre, Vincent nous sert un punch depuis la baignoire dans des verres à dents. L’ambiance est conviviale mais on chuchote car on a pas le droit d’être aussi nombreux normalement. Julien le barman entre dans la suite pour spécifier qu’on ne peut pas faire la fête… sans une boule à facette qu’il a apporté en signe de complicité avec Richard. On ne sait plus qui est client et habitant de quoi et d’où… Arthur gratte à la guitare Hotel California et nous terminons en chuchochantant le refrain entêtant des Eagles.

Voici comment l’hôtel est devenu un étrange théâtre entre fiction et réalité. Une carte dessiné de celui-ci vous est offerte en partant.

Presque toutes ses rencontres sont en face à face, tous les échanges que vous avez eu avec les clients infiltrés sont vrais mais on été mélangés avec des éléments de contextualisation, ce qui vous provoque peut être l’envie de jouer, d’être quelqu’un d’autre, de croire que ce sont de vrai clients et non plus des acteurs.

La Folie Kilomètre, le GK Collective et la Transplanisphère remercient tout particulièrement Julien, Valérie, Mélanie, Lucas, Mickaël et Taleka Tremouilles pour leur hospitalité et leur complicité à l’hôtel ainsi que l’équipe du pOlau-pôle des arts urbains pour leur accueil au Point H^ut pour la réalisation de cette expérience artistique.